Kélerdut - Domaine des Rochers.

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dimanche 16 décembre 2012

16 décembre 2012 à Toulouse, avant la fin du monde.

P1030214P1030212 Une balade au départ du quartier de la Gare Matabiau : Sapins violets sur le toit aux couleurs de la ville...Halte sous les arcades de la place du Capitole. Le marché de Noël brouille la vue de la Mairie et de notre glorieux théâtre. Les relents de vin chaud ont quelque chose d'incongru sous la température clémente. Vous remarquerez que tout est prévu pour retenir le client.        

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Place Esquirol, un sapin de lumière éclaire le carrefour. Il ouvre la voie aux piétons. Ils accaparent la rue  qui leur est enfin rendue. Les travaux seront bientôt achevés. Je déambule sous les étoiles. Un public joyeux flâne devant les animations : chorales improvisées, des hommes à tête d’écran... Le square se rapproche.  Sur la façade du donjon défilent des images au laser. Les badauds sont charmés. Je m’enfonce sous le pavé. Le  métro m'attend. Il ne se passera rien de plus le 21 décembre prochain. Simplement, dans son demi sommeil, il me serrera dans ses bras et me dira “Bon anniversaire ma chérie”. Il y a 36 ans il pleuvait du riz à gogo au sortir de la salle des Illustres. Cette année, on a mis le paquet ; ça va faire du bruit !!!
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mercredi 12 décembre 2012

L'argent sans foi ni loi

J’ai découvert Monique et Michel Pinçon  deux sociologues et leur livre « L’argent sans foi ni loi » lors d’une rencontre à la Librairie de la Renaissance à Toulouse à l’automne dernier.

J’ai profité de leur présence pour leur faire dédicacer leur dernier ouvrage : ils étaient côte à côte devant une mini table, complices dans la vie comme dans leurs livres. Monique est un petit modèle, pétillante et enthousiaste malgré le marathon de ces 2 jours passé à Toulouse. Michel écrit le texte sur la page de garde. Il est plus réservé mais aussi mordant dès qu’on le met sur les rails. On voit bien qu’ils sont fatigués mais ils sont là pour faire le job : transmettre et convaincre. La salle est déjà acquise. C’est un petit amphithéâtre chaleureux qui jouxte la librairie et l’imprimerie, toutes deux gérées par le Parti communiste. Grâce à ces militants et ses sympathisants la Librairie est un vrai lieu de partage et d’éducation populaire.
Une petite synthèse de cette rencontre
Monique  Charlot dit
Il existe peu de sociologues qui s’intéressent aux riches. Les riches ont fait sécession : ils sont en train de se constituer en créateurs de richesses. C’est grâce à eux (d’après eux) que nous avons des emplois. Si on n’est pas à leur botte ils menacent de partir à l’étranger. Ils se posent en victimes.
Méthode : ils ont dématérialisé l’argent. L’argent a une prétention à l’universel (lien social). Il a été dévoyé par la classe dominante. A la sortie de la 2ème guerre mondiale les USA ont signé les accords de Bretton Woods : toutes les monnaies du monde ne sont plus indexées sur l’or. Seul le dollar est indexé sur les réserves d’or. Le dollar devient la monnaie universelle.

Le 15 août 1971, R. Nixon annonce que le dollar n’est plus indexé sur les réserves d’or. La valeur du dollar va changer tous les matins. La planche à billets fonctionne à plein régime.
En 1973, une loi interdit à la banque de France (nationalisée en 1945) de prêter de l’argent à l’état français. L’argent est transformé en arme financière pour détruire les états et asservir les peuples. Désormais, l’état français devra s’alimenter sur les marchés financiers (argent privé).
Le 19 octobre 1985 puis en 2008, la crise est mondiale : on nous a fait croire qu’on a besoin des banques pour vivre. Hors, ce sont les crises qui permettent au système de rebondir. On nous fait croire que pour sauver le monde il faut renoncer à tous les avantages sociaux acquis au fil des siècles.

L’Europe est aujourd’hui la cible des USA. La banque européenne fait fonctionner la planche à billets pour « aider » l’Espagne, la Grèce… à condition que les politiques d’austérité soient à la mesure des désirs de Goldman Sachs.
Michel Pinçon : Le rôle de l’argent dans l’existence de la classe dominante.
Pour appartenir à la classe dominante il faut avoir un patrimoine mais cela ne suffit pas. Que ce soit dans les affaires, dans l’industrie, etc. il faut avoir (de naissance) les bonnes manières. Il faut être adoubé par les membres de la classe pour être accepté dans ce milieu.

L’argent donne du pouvoir sur le temps et l’espace ; il permet d’habiter dans de beaux quartiers. La classe dominante voit d’un mauvais œil l’arrivée dans ces quartiers de nouveaux riches (monde du spectacle, du sport) qui ne sont pas nés riches.
Transmission : quand on a un patrimoine important on ne peut pas ne pas se poser la question de la transmission. Les familles riches ont un rapport à la vie différent de celle des ouvriers car ils inscrivent leur existence dans une grande amplitude.
Culture et éducation : les familles riches envoient leurs enfants dans des écoles particulières. La culture est familière et fait partie du quotidien…Les gens riches deviennent collectionneurs. A un certain niveau de richesse il y a la possibilité de créer. François Pinault a créé deux musées à Venise.
L’argent n’est pas seulement un pouvoir d’achat, c’est un pouvoir symbolique  extraordinaire : on apprend à se vêtir, on acquiert la « classe ». Cette « classe » ne tombe pas du ciel, c’est bien le résultat d’une culture. La classe des riches est une classe très mobilisée. Elle se réunit dans des cercles. Le libéralisme est roi !
Et dieu dans tout ça ? Monique nous dit que la religion est une variable secondaire.
Politique
Les riches sont réunis par une très forte communauté idéologique. Dans les classes moyennes et populaires il y a beaucoup de dispersion au moment du vote alors que dans le milieu des riches le vote de classe est unique.

Au détour d’une remarque de Michel Pinçon on apprend qu’Elisabeth Guigou est un membre actif et influent de la commission  trilatérale en France ; elle fait partie de ces cercles du pouvoir. E. Guigou a présidé en 2008  une session de cette organisation, et présidé une de ses séances dont l'intitulé est "Sauver l'Europe de la tyrannie des référendums" ! Les auteurs du livre rapportent des éléments du compte-rendu du style : "Le référendum irlandais a été humiliant, et prouve que les référendums sont des mécanismes purement destructifs." ou encore : "L'Union européenne a besoin de traités, et les référendums tuent les traités" ! –note trouvée sur le blog de Médiapart –
Monique et Michel Pinçon s’accordent à dire et à écrire que cette classe recherche l’entre soi. C’est une communauté avec ses valeurs, sa langue.
Comment les sortir de leur ghetto ? Leur ghetto était les hôtels particuliers de l’avenue des Champs Elysées. Aujourd’hui cette avenue abrite beaucoup de bureaux et est envahie de touristes. Du coup de nombreux riches l’ont quittée. Ils ont investi d’autres espaces plus tranquilles.
Que faire pour lutter contre cette classe ? (la lutte des classes existe toujours bel et bien !)
Monique et Michel Pinçon nous engagent à suivre leur exemple. Il faut fédérer tous les mouvements ; faire en sorte que tous ceux-ci soient r a d i c a u x !

Tout cela peut paraître banal et le rendu d’un tel moment d’échange fait un peu figure de vieille lune mais c’est autre chose d’y assister.
J’ai beaucoup aimé  l’exposé  revigorant de ces sexagénaires explosifs, le discours parsemé des anecdotes du vécu : comment s’introduire chez Nadine de Rothschild en  gagnant la confiance de la « bonne » ;  leur expérience d’une chasse à courre … ET toujours cette critique distanciée, l’œil aux aguets. J’admire surtout la fidélité à leurs convictions que rien n’ébranle et qu’ils font partager aux jeunes générations des grandes écoles (comme la veille à Sciences Po) subjuguées d’entendre enfin un autre discours !