Mardi 18 octobre, du foot du Canal+ et un téléfilm sur France 3 « Joseph l’insoumis » sur la naissance d’ATD Quart monde. Je n’hésite pas une seconde : je n’ai pas Canal+ et mon homme a choisi de voir le foot chez ses beaux-parents sur un écran grand format où on peut distinguer sans problème la couleur des crachats des footeux. Très peu pour moi.
Le film de Caroline Glorion est formidable par ses acteurs professionnels, Anouk Grinberg et Jacques Weber, tous deux excellents mais aussi grâce aux vrais gens (comme le dit plus tard A. Grinberg) qui arrivent à avoir un jeu alors que c’est de leur vie misérable qu’il est question. L’actrice est encore dans l’émotion des personnalités fortes qu’elle a rencontrées et des leçons qu’elle en a tirée. Le camp de Noizy-le-Grand au début des années 1960 comprend des centaines de familles dans un bidonville sans eau courante ni électricité. Le prêtre ouvrier J.Wresinski se consacre entièrement à ces familles qu’il s’acharne à mobiliser face aux élus politiques, et qui lutte pied à pied contre la police, les assistantes sociales qui harcèlent les familles dont on vient enlever les enfants de force. Il faudra des années pour que J. Wresinski obtienne le relogement des familles dans des maisons carrées. Ces luttes ont donné Aide à Toutes Détresses « ATD Quart Monde ».
L’émission de Taddeï « Ce soir (ou jamais !) » qui suivait était aussi passionnante avec des invités très différents par leur expérience sur le terrain de la misère. L’actrice principale du film Anouk Grinberg m’a bouleversée dans sa vérité en parlant des contacts très forts qu’elle a eus avec ces personnes en grande pauvreté. Le discours de Martin Hirsch était un peu plus policé ; on sent qu’il navigue dans des sphères du pouvoir. Je pense que c’est un honnête homme car cela fait longtemps qu’il se bouge contre l’exclusion ; il a quitté le gouvernement en 2010, un bon point.
J’ai beaucoup apprécié les interventions de l’écrivain Joy Sorman qui a parlé de son vécu lors d’une semaine d’observation à la Gare du Nord "Paris Gare du Nord" (l’arbalète Gallimard). Elle a aussi écrit "L’inhabitable" (éditions alternatives), le récit de sa déambulation dans les habitats les plus insalubres de la capitales, un livre écrit avec l’architecte Eric Lapierre. Après ce genre d’expérience on doit avoir du mal avec les cocktails et les Ferrero Roche d’or chez l’ambassadeur ! Elle ne doit pas beaucoup fréquenter ce genre d’endroit.
J’ai aussi découvert dans ce magazine une autre pointure : Daniel Terrolle consacre ses recherches au devenir des SDF et au tabou social qu’ils représentent. Il défend notamment la thèse qu’il existe un marché de la pauvreté "La lutte contre "la grande pauvreté" : un marché ?" et "L’arrière cour de la mondialisation. Ethnographie des paupérisés" (Editions Du Croquant).
Ils se sont bien accrochés avec Hirsch sur le tabou social que représente la misère et je me suis dit que ça allait enfin donner un peu d’ambiance mais tout le monde est resté très bien élevé.
Anouk Grinberg a écarquillé les yeux dans une incompréhension totale lorsque F. Taddeï a posé candidement la question du choix pour les familles entre laisser leurs enfants à l’assistance publique ou les garder prés d’eux dans la pauvreté avec tout ce que cela suppose de violence de déchéance etc. La sauvegarde des enfants dans une possible seconde chance au travers de l’assistance publique était implicite. Elle s’est maîtrisée avec beaucoup d’intelligence et a finement remis le journaliste à sa place.
Des extraits d’interviews du Père Joseph Wresinski ont été donnés. Il est mort en 1987 peu après la création ATD Quart Monde qui avait le soutien de Geneviève de Gaulle.
23 Heures à la pendule. Je veux lire quelques pages de mon polar suédois. Faut faire des choix. Je lâche Taddeï dont l’émission se poursuit. Dommage ! Il est bien ce magazine.