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tablette relatant la légende de Gilgamesh en écriture cunéiforme. |
Nous finissons notre repas et après une journée de travail, la gym rajoute une couche à ma lassitude. La voix traînante de Kathleen Evin sur France Inter retient pourtant mon attention assoupie. Hier soir il était question dans « l’humeur vagabonde » de l’épopée de Gilgamesh ; Abed Azrié, musicien et chanteur syrien vient d’enregistrer un CD+DVD à l’institut du monde arabe. Il est l’invité de l’émission.Chaque fois que les Sumériens sont cités, je suis renvoyée à l’échec à l’oral de ma deuxième année de droit : l’examinateur n’a pas entendu le son de ma voix ce jour-là. Je suis restée muette sur ces fichus sumériens et leur code d’Hammurabi ! OK j’avais déjà choisi d’orienter mes études vers une carrière plus courte et plus concrète pour convoler avec l’homme de ma vie mais n’empêche que ces peuples vieux de 3000 ans avant JC me poursuivent toujours de loin en loin.
Je reconnais que je suis assez fascinée par l’histoire des religions, quoique qu’athée « Oh grâce à Dieu » comme le disait Ferrat. Ce qui m’intéresse dans ça c’est que les religions parlent des hommes. Quand je visite une chapelle romane, une cathédrale, c’est l’homme que je vois, son œuvre transcendée, son effort. L’histoire des mythes est universelle et nous relie tous. On devrait l’ enseigner à l’école primaire. J’apprends que Jean Bottero (historien mort en 2007) était un spécialiste des sources de la Bible, qu’il était Dominicain et qu’il a été suspendu par sa hiérarchie pour avoir refusé d’attester de l’historicité de la Genèse. Il a été contraint de redevenir laïc. C’est lui qui a traduit l’histoire de Gilgamesh, la première épopée de l’histoire de l’humanité, apparue 5000 ans avant JC, avec l’histoire du déluge itou itou (si vous voulez aller la voir à la médiathèque, c’est la tablette d’argile n°11). Evidemment cette antériorité n’a pas été du goût de l’église.
Cette épopée du roi Gilgamesh, roi d’Uruk (actuel Irak) a été enrichie dans le temps, civilisation après civilisation (ce mythe se retrouve dans la légende d’Ulysse) jusqu’à devenir un récit mythologique dans lequel les grecs, les romains et les trois monothéismes ont pioché.
L’histoire a été brodée… un homme va être modelé par une femme qui le sauve, qui le rend intelligent (le contraire de la bible !) ça me plaît assez ! Enkidou vit en harmonie avec la nature, sauve les animaux des pièges. Un roi envoie une femme pour sauver cet homme. La femme est initiatrice de la civilisation ; elle initie l’homme à un stade au-delà de la condition masculine (grâce à sa maternité). Elle lui dit, après l’initiation « mange du pain, bois du vin ». Ah oui là il y a beaucoup de similitudes avec la Bible…
La légende du roi Gilgamesh et d'Enkidou est emblématique d’une quête vers l’amour, l’amitié au travers des diverses épreuves. Beaucoup de religions se sont passionnées pour cette légende millénaire mais cela n’était pas très bien vu.
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La grande ziggurat d'Ur (Sud de l'Irak) |
Abed Azrié nous dit que cette légende est l’histoire d’un cheminement de l’homme vers la sagesse. Il évolue d’une religion où les dieux sont multiples vers des religions pré monothéistes. La question qui est posée dans cette histoire de Gilgamesh est celle de l’effort que produit l’homme pour changer sa vie. Aprés la mort d'Enkidou son ami, Gilgamesh va devoir dépasser sa douleur. C'est la leçon du mythe : en passant par l’effort on devient autre chose, on devient un homme de sagesse et de connaissance.…un dernier effort ; l’homme de ma vie a débarrassé la table pendant que j’écoutais, je ferme le lave-vaisselle, j’appuie sur le bouton. J’ai gagné le droit de comater devant le film TV sur Poupoupidou (un drôle de mésopotanien). Pas mal d’ailleurs ce téléfilm.